Crise ou pas, recruter c’est manager. Et inversement.

Depuis le début de la crise, celle-ci étant passée de ‘sanitaire’ à ‘économique’ et ‘sociale’, j’entends autour de moi les réflexes connus de notre marché : recruter en temps de crise serait une hérésie, n’y pensez pas. Voilà le gros temps qui arrive pour les cabinets de recrutement… certes.

J’entends aussi ces voix douces et bienveillantes autour de moi, ou bien celles des journalistes éco, me poser des questions qui paraissent logiques:

Ah, ce doit être une période difficile pour vous dans le recrutement?

Ou:

Évidemment, toutes les missions de recrutement ont dû s’arrêter?

Mais aussi:

Croyez-vous vraiment que les candidats doivent poursuivre leurs recherches?

J’ai 40 ans, 18 ans dans le « métier » et je vis aujourd’hui ma 3ème crise, ayant traversé en « junior » celle post-2001 puis, plus confirmée alors, celle des Subprimes de 2008/2009. Entre chaque crise, l’allant économique et son flot de projets comme de concurrents nouveaux. A chaque crise, la sidération imposée aux investissements et notamment en matière de ‘ressources humaines’, son lot de perturbations sur le marché des « recruteurs » et une guerre des prix, bien sûr, mais à quel prix?

Avec le temps, je me dis que mon cuir se tanne et que je garde la tête froide face à ces réflexes classiques, compréhensibles mais pas toujours logiques – qu’on me préserve néanmoins de finir « vieille sachante à principes », je retournerais cultiver ma terre avant. Avec le temps surtout, je crois que j’ai surtout appris à appréhender, vivre et appliquer mon métier dans ce qu’il a de noble et de plus grand que ce qu’une crise, quelle qu’elle soit, peut arrêter: recruter, c’est manager. Et inversement.

Recruter, c’est manager parce que…

C’est mettre au clair, face à la stratégie de l’entreprise ou ses besoins plus instantanés, les esprits et les qualités dont elle aura besoin. Une entreprise doit être en mouvement et ce sont ses collaborateurs qui la font tourner. Les RH en seront donc la chaudière qui impulse chaleur et énergie.

Que l’entreprise ait à déployer une stratégie durable, affronter une tempête ou calmer une pandémie, c’est avec ses équipes qu’elle le fait. En bien ou en moins bien. Mon métier, c’est d’éviter la seconde option et de permettre que la faculté de résilience des équipes soit réelle à chaque instant. En temps de paix, c’est accompagner pour préparer la force des équipes, donner de la cohérence et faire que la chaudière exprime toute sa puissance. En temps de guerre, c’est identifier ceux sur qui s’appuyer pour aujourd’hui et pour chaque jour qui le suit, permettre que la mécanique « entreprise » ralentisse le moins possible pour éviter les pires effets de l’inertie.

De ce fait, doit-on encore se poser la question de l’utilité d’avoir une vraie stratégie RH après ça ? Aujourd’hui et pour demain, j’invite à ne pas prendre le retard comme en 2008-2009, de rapidement se poser (… oxymore) et regarder, dans chaque entreprise, si et comment la chaudière a bien tourné, si et comment l’organisation RH et sa gouvernance d’entreprise sont les plus à mêmes d’agir et réagir, si et comment chacun·e y a trouvé son compte et la confiance en l’avenir et en les autres, si et comment nous infusons et diffusons avec justesse ce « qui nous sommes et qui nous voulons être » qui fera nos beaux jours demain.

La crise, en somme, c’est le moment nécessaire du miroir grossissant. Nous sommes là pour ça.

Manager, c’est recruter parce que…

Auprès de chaque personne sur laquelle moi, manager, je peux m’appuyer, je me dois d’être convaincant·e, sincère et confiant·e.

D’aucuns diront que, oui, en processus de recrutement, il faut évidemment séduire les candidats, promouvoir son entreprise, attirer et faire signer un contrat de travail. Ce serait essentiellement « ça » le recrutement si j’entends les discours, là, tout de suite, maintenant. En tous les cas, c’est le virage qu’il fallait prendre sur le dernier cycle d’euphorie. Nous aussi parlons de marque-employeur, nous aussi évidemment nous parlons « d’embauches ».

Au-delà de ces niveaux attendus du recrutement, au-delà de l’embauche, je propose surtout de comprendre que cet acte de recruter est un acte managérial quotidien. Il l’est encore plus aujourd’hui qu’hier. À l’image de ce qu’un couple vivrait, c’est comment chaque jour je cherche à constamment réinventer, nourrir et rencontrer sincèrement cet Autre avec qui je collabore. Manager, c’est se recruter, c’est-à-dire se choisir et savoir se choisir, à nouveau chaque jour, managers et collaborateurs, employeurs et employés. En tout contexte, à tout moment.

Recruter, c’est donc se reposer les questions en permanence : avec qui et comment je veux travailler? avec qui et comment je veux engager ma carrière? avec qui et comment je veux pouvoir m’adapter aux cycles qui m’attendent et nous attendent tous? avec et qui comment j’organise l’entreprise et je m’adapte aux marchés? avec qui et comment je crée les conditions de la confiance?

Recruter vaut alors tout autant auprès des nouvelles têtes qu’auprès des fidèles de nos entreprises. Chaque jour, nous continuons donc tous à recruter car nous avons besoin de constamment nous rencontrer, sortir de la boîte et de nos codes pour nous connecter. Nous sommes là pour ça.

Nous ne sommes pas des bisounours

Bien sûr, au sein de l’étincelle RH, nous sommes secoué·e·s. Bien sûr, nous contractons moins de commandes auprès de nos clients et nous rabattons les voiles pour passer la tempête. Pourtant, avec grande modestie en ces temps incertains, j’ai le sentiment que nous résistons aux bourrasques, que notre carnet de commande reste actif et que nous continuons à générer de nouveaux projets avec nos clients. Jusqu’ici tout va bien, comme dirait l’autre.

En 2010, quand je crée l’entreprise, je savais qu’un jour ou l’autre, une nouvelle crise arriverait. Je ne suis pas économiste, pas spécialiste en géo-politique non plus, bien loin de tout ça. Je suis psy, voyez l’écart. C’est simplement du bon sens paysan que d’envisager qu’il y aura toujours une alternance d’années de disette et d’années d’abondance.

L’étincelle RH est née sur les cendres encore fumantes d’une crise profonde et il s’agissait alors de progressivement construire un modèle résilient pour passer la tempête qui surviendrait un jour.

La résilience de l’étincelle RH, c’est partager avec d’autres que soi une vision. La nôtre, c’est cette vision noble, stratégique et sincère du recrutement que j’ai essayé de décrire plus haut. Nous continuons à l’écrire, en s’amusant et en travaillant (l’un n’allant jamais sans l’autre).

La résilience, c’est essayer de toujours proposer ce sur-mesure utile et efficient à nos clients et sur cette grande chaine de valeur qu’est la Rencontre en entreprise. Être là quand et où ils ont besoin, jamais là où on chercherait juste à prendre. Nous questionnons, nous expérimentons, nous tentons, nous échouons, nous nous relevons, nous partageons. Vous ai-je dit qu’un seul emblème suffirait à l’entreprise ? celui du souple roseau, évidemment.

La résilience, c’est aussi faire en sorte que les fondations financières soient solides. Nous veillons à une saine gestion, nous trouvons les équilibres, nous anticipons.

La résilience, enfin et surtout, c’est permettre tout cela en recrutant une équipe convergeant vers cette vision, une équipe agile pour s’adapter aux mouvements, mature pour assumer les vents fous, créative car diversifiée par les profils et les parcours, et intelligente. Nous « nous » recrutons chaque jour pour nourrir cette résilience et la chaudière tourne : très chère équipe étincelle RH, merci pour la chaleur, merci pour l’énergie car nous avançons.

Recruter, c’est à coup sûr ici, dans cet acte managérial quotidien autant que stratégique, dans ce mouvement permanent, que se niche le rebond de chaque entreprise.