J’ai peur de recruter un mauvais dirigeant

Bande de Flippés, c’est notre podcast en partenariat avec Le Lab RH.

Dans cet épisode : Léonard Collon nous confie sa peur de recruter un mauvais dirigeant.

Vous pouvez l’écouter, ou simplement lire la transcription ci-dessous.

Bouh !


Léonard J’ai peur de recruter un mauvais dirigeant.

Intro/Outro Bouh! Bienvenue dans Bande de Flippés, le podcast qui explore les peurs des RH et des recruteurs. Que l’on ait deux ou 20 ans d’expérience dans la fonction, les doutes subsistent, inhérents à la complexité de la nature humaine. A qui puis j’en parler ? Dois je partager à ce sujet ? Où trouver les solutions ? Nous partons à la rencontre de DRH, RRH, recruteurs et recruteuses qui se confient à notre micro et ont décidé d’affronter la peur… de parler de ses peurs.

Etienne – L’étincelle RH Bonjour Léonard.

Léonard Bonjour Étienne.

Etienne – L’étincelle RH Est-ce que tu peux nous expliquer ta peur ?

Léonard [00:00:39] Alors moi j’ai toujours peur de recruter un mauvais dirigeant. Ça peut s’articuler de plusieurs manières. Si on parle d’intégrité, quelqu’un qui probablement aurait commis des méfaits ou des entorses à la légalité. Ça peut s’interpréter aussi d’un point de vue de compétences, de recruter la mauvaise personne pour un rôle ou pour un certain contexte donné. Ou ça peut être tout simplement de recruter quelqu’un qui potentiellement aurait eu par le passé ou aurait par le présent des mauvais comportements. Ici, on parle effectivement de harcèlement, on peut imaginer beaucoup de scénarios qui seraient très négatifs. Et quand on est executive recruteur, c’est un enjeu important à la fois pour le business mais aussi à titre de crédibilité personnelle que de recruter les bonnes personnes.

Etienne – L’étincelle RH Et comment on fait pour évaluer justement ces dimensions que tu évoques, sur lesquelles on n’a pas forcément toute la prise complète peut-être en termes de processus d’évaluation ?

Léonard Alors il y a toujours une part de magie dans le recrutement, puisqu’on rencontre des gens, et on se fie évidemment à ce qui est dit et à ce qui est partagé. Pour autant, une fois qu’on a dit ça, le recrutement reste une discipline très scientifique. A savoir qu’on peut croiser un certain nombre d’assessments, on peut croiser un certain nombre d’évaluations, on peut aussi se fier à la réputation d’une personne sur le marché, à des prises de références directes ou indirectes, on peut se fier aussi tout simplement à des gens qui ont travaillé avec la personne… Passé un certain niveau de poste, il est assez rare que quelqu’un ne soit pas connu du tout pour un même secteur ou pour une certaine typologie de poste. Et très souvent, et je pense que tu le sais mieux que moi, quand on recrute à un certain niveau, si on parle des c-level, c’est à dire des gens qui sont souvent membres de board ou de comités exécutifs, on a affaire à des gens qui, la plupart du temps, ont une très longue carrière derrière eux, ce qui fait qu’il y a finalement assez peu de hasard en termes de compétences choisies, et on trouve toujours plusieurs personnes qui se connaissent ou qui ont travaillé ensemble à un moment donné dans leur carrière. Raison de plus d’ailleurs de toujours faire attention aux traces qu’on laisse, je dirais, dans le temps et au relationnel qu’on a pu construire. Si on parle d’un point de vue plus concret d’assessment, il y a des cabinets qui sont spécialisés là dessus, les gros cabinets de recrutement ont un certain nombre de méthodologies, ça c’est une partie possible de l’assessment. Une autre partie peut être autour des tests de psychologie, etc. Et d’autres tests ad hoc qui existent, qui, je pense, sont intéressants parce qu’ils donnent une indication sur la personnalité des dirigeants. Pour autant, ce sont des indications qu’on peut aussi, je dirais, analyser et comprendre à partir des échanges et des entretiens qu’on peut avoir avec des dirigeants. Et puis enfin, il y a la question de la mise en situation. Ça peut être des études de cas pratiques ou théoriques et stratégiques, et, je dirais, quand on a un certain nombre de ces outils, on doit a priori pouvoir avoir un assessment ou une évaluation en bon français, qui soit relativement juste sur la réalité face à laquelle on se trouve dans le cadre de recrutement d’un dirigeant.

Etienne – L’étincelle RH Là tu parles des méthodes, des processus qui permettent en effet d’évaluer les compétences du dirigeant. Mais tout à l’heure, quand tu évoquais ce qui est pour toi un mauvais dirigeant, tu parles de dimension éthique, tu parles de valeurs, comment on construit un processus pour évaluer cette dimension-là qui était celle liée à ta crainte ?

Léonard Alors c’est toujours une question relativement difficile que d’avoir plus d’informations que ce qui va être officiellement partagé et de manière très concrète, il se pratiquait il y a quelques années des recherches : on faisait appel à des détectives privés, des choses comme ça. Ça peut être une piste. Pour autant, là, on touche à la limite de la légalité et aussi à des pratiques qui, du point de vue du recrutement, ne seraient pas forcément très éthiques.

Etienne – L’étincelle RH Ce que j’entends dans ce que tu dis là, c’est des pratiques qui ont pu exister sur des recrutements de postes Executive ?

Léonard Dont j’ai entendu parler oui, que j’ai pratiqué non pour le coup.

Etienne – L’étincelle RH Est-ce que le recrutement d’un dirigeant doit aller jusqu’à prendre en compte des éléments de sa vie personnelle pour évaluer la dimension éthique ?

Léonard Alors c’est toujours une question relativement délicate. Si on est très concret et qu’on parle de grosses sociétés où les enjeux et financiers et humains sont très importants, la dimension personnelle et professionnelle, ces deux dimensions là sont toujours relativement mélangées. Et très souvent au même titre qu’on ferait pour un homme politique, on a intérêt à vérifier un certain nombre de paramètres pour être sûr que, en termes de réputation publique, la société soit pas mise à risque. De ce point de vue là, je dirais, la méthode la plus courante c’est de faire des prises de référence directes ou indirectes. Directes, en demandant aux dirigeants effectivement de fournir une liste de personnes avec laquelle ou lesquelles il a travaillé, soit dans un passé relativement proche, soit dans un passé plus lointain. On parle souvent de ces analyses à 360 degrés avec des gens qui, reportaient aux dirigeants ou dirigeantes, à des gens qui étaient leurs pères et des gens qui potentiellement étaient leur boss pour pour faire simple. Ça, c’est une approche possible. Une autre approche possible que je vois assez souvent, c’est de regarder aussi en interne dans la société, admettons, pour laquelle on recrute, s’il n’y a pas des gens qui viennent ou qui connaissent déjà un certain nombre de candidats qui sont shortlistés. Donc ça c’est un moment relativement délicat parce qu’on parle de prise de référence qui pourrait être qualifiée de prise de référence sauvage. Pour autant, ça donne déjà un élément d’indication si effectivement on a une levée de boucliers en interne quand on émet l’hypothèse d’un profil. Je fais le rapprochement avec le monde politique de manière assez facile : quand un président veut nommer un nouveau premier ministre, pour pas le citer, il distille quelques noms dans la presse et souvent ça donne déjà un petit peu le ton de l’orientation qui serait possible. Mais ça permet aussi et surtout de tester des réactions et de faire sortir quelques cadavres du placard quand il y en a. Donc ça, ça peut faire partie des méthodologies à proprement parler pour essayer d’en savoir plus.

Etienne – L’étincelle RH Dans ce que tu évoques il y a une part du processus qui se base sur cette dimension de prise de références. Comment en tant que recruteur on arrive à sécuriser, en tout cas à rendre son processus évaluatif le plus objectif possible quand ces méthodes là parfois peuvent amener pas mal de biais, notamment quand c’est en effet une liste de contacts fournie par le candidat ? Comment on arrive à sécuriser l’objectivité d’un processus d’évaluation quand on est sur des cadres dirigeants ?

Léonard Alors l’objectivité totale n’existe pas. Je ne veux pas démonter un mythe, mais je reste persuadé que le recrutement par principe, c’est d’essayer d’associer des critères objectifs et de les lire à l’aune de notre subjectivité et d’un contexte donné pour lequel on considère qu’un profil correspond à ce dont le contexte a besoin. Je parle assez souvent des différents types de personnalités : vous avez des dirigeants qui sont très bons pour faire grandir un business, d’autres qui sont très bons pour rationaliser un business, d’autres qui sont très bons pour partir de zéro et construire un business, etc. Donc je dirais en fonction un peu de ce qu’on recherche, on va affiner et modifier les critères pour que les critères correspondent à évaluer ce dont on a vraiment besoin. Si on parle d’objectivité stricto sensu, la clé pour être objectif dans un dans un contexte de recrutement, c’est d’avoir les mêmes critères pour tous les candidats. Ça, je pense que c’est un élément extrêmement important pour éviter les biais. Ensuite, c’est aussi de multiplier les outils de telle sorte que la prise de référence telle qu’on l’a décrite, directe ou indirecte, ne soit pas l’élément ou le facteur principal mais soit un élément parmi d’autres de collection d’informations. Et je pense que quand on a cette approche extrêmement rationnelle de se dire on met en place des critères en amont du recrutement, on va utiliser un certain nombre d’outils et on va croiser les résultats de ces différentes évaluations pour en tirer quelque chose qui sera lu à l’aune du contexte dans lequel on a besoin de recruter et peut-être du contexte de la société ou de la culture d’entreprise ou de l’équipe à proprement parler.

Etienne – L’étincelle RH Quand tu parles justement d’objectivité, si je reviens sur les compétences métiers tu parlais de la logique d’assessment, pour toi l’assessment est une étape obligatoire dans un processus de recrutement d’un cadre dirigeant ? Optionnel ? Mais dans quel cas et quelle configuration ? C’est quoi ton regard ?

Léonard Alors l’assessment de la manière dont tu l’entends, c’est de faire appel à des cabinets à l’externe qui éventuellement ont leur propre méthodologie, on parle de ça on est d’accord ?

Etienne – L’étincelle RH Avec de la mise en situation tout à fait.

Léonard Alors, pour moi, c’est quelque chose qui peut avoir son intérêt quand on est dans des situations très particulières, et notamment quand des sociétés sont à des moments stratégiques de changement extrêmement fort. De manière générale, ça reste pour moi optionnel dans la mesure où le recrutement est affaire d’abord des personnes qui vont rencontrer votre candidat. Candidat dirigeant ou candidat tout court, c’est relativement le même principe. Donc, ce qui va être important avant de parler d’assessment, c’est de réfléchir à quel va être le panel, c’est à dire les personnes qui vont évaluer le dirigeant. Ce qui est important ici, ce sont deux éléments : la première, c’est la crédibilité de ces personnes, de telle sorte que l’évaluation puisse se faire dans les deux sens, à savoir que le candidat dirigeant puisse lui aussi comprendre quel est le contexte de l’entreprise et, au fur et à mesure des échanges avec le panel, puisse construire une idée de l’entreprise qui correspond le plus proprement possible, le plus proche possible, à la réalité de ce qu’est la situation. Ça, c’est une première chose. La deuxième chose qui est importante, c’est que les personnes effectivement qui vont faire des évaluations restent le plus objectives possible et qu’on leur donne une feuille de route et qu’on les accompagne très clairement. De ce point de vue là, l’assessment va juste ajouter un élément supplémentaire ou une nuance ou une coloration supplémentaire, en offrant différentes perceptions qu’on considérera plus ou moins objectives en fonction de l’assessment qu’on aura choisi, et peut-être, je dirais, du caractère très spécifique de l’assessment sur une dimension particulière. Mais de manière générale, moi je fais beaucoup confiance aux équipes et je pense que si vous avez d’autres dirigeants qui vont interviewer un potentiel futur dirigeant et qui ne sont pas en capacité d’être objectifs ou d’avoir des critères clairs, déterminés, qui vont permettre de comparer des candidats et des expériences et des skills ou des capacités, c’est qu’à priori il y a eu une problématique dans la société.

Etienne – L’étincelle RH Et comment justement tu structures ton processus de recrutement sur ces profils de dirigeant ? Qui rencontre ? Qui valide ? C’est uniquement dans ce cas là les administrateurs et les actionnaires potentiels ? Est-ce que c’est d’autres acteurs ? Comment tu structures ton processus ?

Léonard Alors je dirais ça dépend de quel niveau de dirigeant on parle. Quand on parle de dirigeant de manière générale, en fait, très souvent, on a trois niveaux de direction générale : une première direction qui va être tout en haut de l’entreprise (ici, ça peut être le board, le comité exécutif ou le board of directors), tout dépendra évidemment de la structure de l’organisation dont on parle. Ensuite, on peut avoir des directeurs qui vont souvent être directeur de business unit ou directeur d’une partie de l’entreprise ou d’un écosystème. Et puis après on a ce qui vont être très souvent les senior managers directeurs de premier niveau, si on peut les appeler comme ça. Là, on parle plutôt des grosses sociétés qui vont avoir plusieurs strates hiérarchiques. En fonction du type de profil et du type de contexte, on va construire son panel et ses critères objectifs de différentes manières. Soit on va s’intéresser d’abord aux capacités, aux skills et je dirais à ce que le dirigeant peut potentiellement apporter que l’entreprise n’aurait pas. Ça, c’est un élément important. Ensuite, on va s’attacher à la personnalité, à la personnalité du dirigeant, mais aussi à son style de leadership et à la manière dont il conçoit lui même le rôle. Ça, c’est un autre élément important. Et puis enfin, on va s’intéresser aussi à la vision que le nouveau dirigeant pourrait avoir pour l’entreprise. Une fois qu’on croise un peu tous ces critères, on a grosso modo une petite liste de quels sont les éléments importants dont on va avoir besoin et qui vont servir de base pour établir des critères qui vont servir aux questionnaires et aux échanges pendant les interviews. Ensuite, pour répondre à ta question de manière plus directe, qui va interviewer ? Je pense que dans ce cas là, on a besoin d’avoir des gens qui sont crédibles d’un point de vue de leur niveau de poste, des gens qui aussi connaissent la réalité je dirais un petit peu au quotidien, à savoir que typiquement, si on parle d’un CEO ou d’un dirigeant, avoir des membres du board qui vont l’interviewer des actionnaires ou des stakeholders importants, c’est une première étape, mais ce ne sera pas suffisant pour pouvoir être en capacité de comprendre la dimension peut-être plus tactique du rôle de CEO si on reste sur cet exemple là. Et de ce point de vue là, ça pourra être intéressant que la personne puisse être interviewée par ceux qui vont travailler avec elle, mais aussi ceux qui peu- être seront des stakeholders indirects mais néanmoins importants. De ce point de vue là, c’est important de construire son panel avec une certaine forme de diversité. Diversité de parcours, diversité en termes de genre, mais aussi de diversité en termes de niveau de rôle et de niveau d’implication. Ne serait-ce que pour offrir une vision pourquoi pas technique, à un futur CEO d’être interviewé par le CTO de la société ou par des gens qui ont aussi soit un œil très neuf, qui sont là depuis quelques mois, quelques années, soit un œil très ancien, qui ont l’historique de la société. Donc je pense que l’approche la plus efficace, c’est d’avoir une approche la plus diversifiée possible, mais aussi d’être sûr que chaque panéliste soit pertinent par rapport au rôle qui est recruté. Et typiquement, j’irais pas forcément choisir un directeur d’une toute petite centrale d’achat pour aller recruter un nouveau CEO, ça ferait pas sens.

Etienne – L’étincelle RH Et c’est quoi le recrutement le plus complexe de dirigeant que tu as pu gérer ?

Léonard Le recrutement le plus complexe que j’ai eu à gérer, c’était un profil de vice président dont la géographie et le scope allaient probablement changer, et en cours de route. Donc, il y avait cette dimension d’incertitude d’arriver à vendre un contexte qui allait lui même évoluer, et aussi deux zones géographiques très différentes qu’étaient l’Europe et l’Asie, avec évidemment des problématiques de nature très différente pour le business. Ici, la clé de sortie qu’on a trouvé avec l’équipe, c’était de mener en réalité deux recherches parallèles : une recherche sur un des marchés clés, le marché européen, et une recherche sur le marché Asie-Pacifique, et d’aller chercher des profils qui, dans les deux cas, avaient déjà soit été en poste dans l’autre zone géographique, soit avaient travaillé en étant en Asie pour des sociétés européennes, en étant en Europe, pour des sociétés asiatiques, pour avoir à la fois cette dimension de connaissance du marché, mais aussi pour avoir cette dimension de connaissance des différences culturelles ou je dirais même plus, des nuances culturelles puisqu’on parle de continent. Alors évidemment, un certain nombre de nuances en termes de pays, de langue, etc, qui sont difficiles à appréhender pour des candidats qui n’auraient, par exemple, eu d’expérience que dans une des deux zones géographiques. Et puis, à cette dimension s’ajoutait cette dimension de change management, d’accompagnement au changement, dans un contexte de très grande transformation qui allait modifier profondément les équilibres entre ces deux régions. On parle d’un déplacement de headquarter, en cours de route, donc nécessairement la difficulté portait sur ce changement à venir, sur ces deux zones géographiques, mais aussi sur le niveau de confidentialité qu’on pouvait partager puisque nécessairement, dans ce type de recrutement, on ne peut pas tout dire et on ne peut pas tout partager parce que les équipes en poste ne sont peut-être pas forcément au courant de tous les changements à venir et que tout n’avait pas été annoncé publiquement, ce qui, pour une société cotée, pose évidemment un certain nombre de difficultés comme on peut se l’imaginer. Ça, c’est probablement un des cas les plus compliqués sur lequel j’ai pu travailler. Et puis on a trouvé la bonne personne. Il s’est trouvé que c’était une femme qui avait fait sa carrière dans plusieurs zones géographiques et qui avait une connaissance très très fine justement, de ces distinguos culturels.

Etienne – L’étincelle RH Tu évoques une notion qui est intéressante, qu’on retrouve  dans des recrutements on va dire plus classiques aussi, mais on essaye d’apporter une vision assez claire aux candidats de l’environnement, du poste et des enjeux, sur ce niveau de poste en effet on touche rapidement à parfois des informations très stratégiques, donc avec des degrés de confidentialité importants, comment on gère un processus de recrutement quand finalement on a peu d’informations à donner aux candidats au démarrage ? Parce que le contexte fait qu’on est sur des enjeux très stratégiques en termes de contenu, de manière assez immédiate.

Léonard La première approche pour bien gérer ça, c’est d’être transparent sur la situation et sur le fait qu’on ne peut pas tout partager. Passé un certain niveau de poste, les candidats sont très informés, souvent ont déjà une petite idée de à quoi s’attendre, mais aussi sont très habitués à ce qu’il y ait une forme d’incertitude qui demeure dans les discussions, à ce qu’on ne puisse pas tout partager. Et pour donner un exemple très concret, il m’est arrivé assez souvent d’ailleurs, d’approcher… moi j’ai fait du recrutement en externe et en interne. En étant en interne, d’aller approcher des candidats dirigeants de la société concurrente la plus claire pour tout le monde. On est dans des discussions qui sont un petit peu un jeu de dupes dans la mesure où eux ne peuvent pas partager notamment des chiffres, dès qu’on va parler de taille du business et qu’on va parler de scope, de turn over, etc. Et nous n’avons pas la capacité non plus exactement de partager quel serait notre projet et la raison pour laquelle on les approche, etc. Donc là, dans ce cas là, il y a une forme un petit peu de jeu qui s’installe, et je pense que la bonne approche, c’est d’être très honnête sur le fait qu’il y a un certain nombre d’informations qu’on ne peut pas partager à ce stade, et très souvent les candidats le comprennent. Tout comme nous on comprend quand on leur demande un peu quelle est la taille de votre scope sur un projet très stratégique, ils vont nous dire « je ne peux pas vous donner de chiffres ». Ou alors on essaye de jongler un petit peu en demandant une idée, est-ce qu’on parle de 500 millions, 1 milliard ? Est-ce qu’on parle de plus de 3 milliards ? D’essayer d’avoir de quoi jauger un petit peu malgré le fait qu’on ne puisse pas partager d’informations pour les raisons confidentielles que tu as évoquées.

Etienne – L’étincelle RH Et comment on arrive dans ce cas là à réellement évaluer un candidat quand on est dans un jeu de dupes, si je reprends tes termes, où on se dit des choses mais sans vraiment rentrer dans une finesse d’éléments ? Donc la part du subjectif est ultra importante.

Léonard Alors pas tant que ça dans la mesure où, on fait beaucoup de recherches sur le marché et très souvent, si on parle de ce type de cas qui sont quand même des cas un peu particuliers, très souvent on a des équipes qui connaissent bien le concurrent, qui peuvent apporter des informations. On a rarement une seule personne dans la société qui vient de la société concurrente. Donc, je dirais, on a très souvent beaucoup d’informations objectives qui viennent du marché. Il y a un certain nombre d’informations qui sont parfois incertaines, il y a des rumeurs qui circulent, il y a un certain nombre de choses, mais de manière générale, dans le monde du business, tu le sais mieux que moi, les gens quand même se parlent, on se connaît, on a des informateurs, on a des gens qu’on peut appeler, on a des gens qui viennent de la structure de manière relativement récente et qui peuvent donner une petite idée. Et puis on a aussi des feedbacks de clients, de clients quand on est un cabinet de d’exécutifs search, mais aussi de clients quand on travaille avec des dirigeants qui travaillent eux mêmes avec les clients. Donc de manière générale, les gens qui sont très bons sur le marché, c’est ce que je dis toujours que ce soit à des juniors ou même à des candidats très seniors, on sait qui est très bon sur le marché. Et très souvent, quand on démarre une chasse et qu’on pose la question en interne, ou même au dirigeant qui est notre commanditaire, demander « qui est-ce que tu connais déjà, qui serait très bon pour le poste ? », ils ont déjà quelques idées en tête. Donc je dirais ça nous donne une idée un petit peu déjà de quelle est la réputation et l’aura réputationnelle d’un dirigeant. Et je pense que ça, c’est une dimension qu’on oublie assez souvent. On s’appuie sur des données objectives issues des entretiens structurés, on s’appuie éventuellement sur des assessment, mais on oublie que cette notion de réputation elle est vraiment centrale, puisqu’en fait la réputation elle vient pas de nulle part, elle vient souvent d’un track record, elle vient de résultats qui sont objectifs. Et quand on a transformé un business qui marchait pas du tout dans une région difficile en une cash machine pour une très grosse société de manière générale, ça s’est pas fait en un jour et souvent ça laisse des traces. On le sait, les gens s’en souviennent et c’est qu’il y a probablement eu des bonnes décisions qui ont été prises et les bonnes décisions elles sont prises par quelqu’un.

Etienne – L’étincelle RH Tu parlais tout à l’heure de la dimension des valeurs et d’éthique, c’est un terme dont on entend beaucoup parler, des « managers toxiques » dans les organisations, qui veut parfois dire beaucoup de choses. Mais tu peux avoir un manager en effet qui, dans ce qu’il te présente en termes de dirigeant, de réputation qui a ultra performé, mais sur lequel la façon d’y aller, la façon d’emmener est en décalage peut-être culturelle avec la nouvelle organisation pour laquelle tu recrutes. Comment tu garanties dans ton processus, cette capacité à recruter un manager éthique tel que tu le perçois pour l’organisation pour laquelle tu recrutes ?

Léonard Alors le risque zéro d’abord n’existe pas. Donc je dirais on est, comme dans n’importe quelle décision de recrutement, face à une petite prise de risque. L’idée étant de minimiser les risques et de faire en sorte que on ait suffisamment de données pour prendre une décision qui soit appuyée sur assez de données pour limiter ce risque. Comment on fait ? Alors d’abord on a un certain nombre de données très concrètes du type le nombre de personnes qui, par exemple, sur six mois, un an ou douze ans ou dix ans, sont partis de la structure ou sont partis de la business unit du dirigeant en question. Déjà, ça c’est un premier indicateur. Rien n’interdit d’aller contacter d’autres personnes pour sonder un petit peu ce qui se passait quand ils ont déjà quitté l’entreprise. Donc ça, ça peut être déjà un élément. Un deuxième élément, c’est que très souvent, ça se sait ce genre de choses. Et si on regarde tous les scandales récents de ces quinze dernières années d’Enron à… j’en ai d’autres en tête que je peux pas citer là, très souvent on entend les gens dire « mais en fait on le savait, tout le monde le savait ». Et si on prend les scandales de mœurs, c’est la même chose. Donc je dirais, la plupart du temps, si on a fait une dew diligence réputationnelle en allant se renseigner auprès de gens qui ont travaillé avec la personne par le passé, on limite déjà une partie du risque. Après, effectivement, les dirigeants qui ont des réputations difficiles sont souvent quand même connus sur un certain marché et a fortiori quand on passe je dirais le niveau de directeur ou de managing Director, et qu’on parle de centaines de millions ou plusieurs milliards de chiffre d’affaires gérés ou de revenus, c’est un petit marché où il n’y a pas énormément de candidats qui ont une certaine spécialité ou une connaissance du secteur. Donc très souvent, les gens se connaissent. Et ça, c’est quelque chose sur lequel on peut s’appuyer dans sa propre structure et dans son propre réseau aussi, pour essayer de sonder un petit peu, je dirais, avec des éléments concrets. Là où il y a une difficulté, c’est qu’effectivement on est sur quelque chose qui est très subjectif, on est sur des rumeurs, sur des perceptions, sur de l’optique. Il nous faut considérer ça que comme un élément parmi d’autres. Après, je dirais, ce qui est important c’est d’être très au fait sur la culture d’entreprise qui est la culture dans laquelle l’entreprise fonctionne, notre culture d’entreprise quand on recrute, mais aussi la culture d’entreprise qu’on souhaite avoir dans le futur, et que le dirigeant a un impact extrêmement important de par sa personnalité, de par ses compétences sur la culture d’entreprise aussi.

Etienne – L’étincelle RH On parle aujourd’hui du recrutement de postes executive, il y a parfois une perception, une vision très élitiste des recruteurs qui sont sur ce type de postes versus des recrutements plus classiques. C’est quoi ton regard sur lerecrutement executive ? Est-ce qu’il y a véritablement des choses qui changent dans le métier par rapport à un recruteur qui va sur d’autres métiers ou d’autres niveaux de poste ? Ou non c’est juste le type de profil qu’on va chercher, mais sans réelle différence ? Quelle est ta vision ?

Léonard Alors je suis relativement un mauvais exemple parce que je pense que… J’y ai réfléchi un petit peu en préparant notre échange, je pense que ce qui a fait mon succès sur d’autres strates de recrutement, sur d’autres typologies de profils, était d’avoir, je pense, assez intuitivement senti que le recrutement c’est d’abord une question de connexion, c’est d’abord une question de niveau de service qu’on peut proposer et c’est une question d’avoir une vision très business des choses et qu’il s’agit pas « d’aimer l’humain » comme on dit assez souvent, mais qu’il s’agit de résoudre un problème business et que le recrutement c’est du problem solving en mauvais français. Qu’est-ce qui change entre le recrutement d’un software ingénieur et puis d’un managing director dans une grosse société cotée ? Fondamentalement, évidemment, le niveau des gens auxquels on parle, la gravitas ou la posture de ces personnalités et probablement les attentes qui peuvent, je dirais, renvoyer envers leurs recruteurs. Ça, c’est une réalité. Pour autant, le processus en lui-même est peut-être davantage politique et peut-être davantage nuancé, mais on reste sur l’idée qu’il s’agit de trouver une personne et des compétences au premier chef qui vont résoudre un problème business. À savoir des compétences qui manquent dans une structure, une structure qui a besoin de se développer, une structure qui a besoin de grandir ou d’être rationalisée, etc. Donc fondamentalement, le principe même du recrutement est pas très différent. Ce qui va toutefois changer, c’est qu’on va attendre du recruteur beaucoup plus et que le positionnement sera beaucoup plus stratégique dans le sens où il s’agira un peu moins de trouver des cv, de contacter juste des candidats ou de qualifier si un candidat a telle ou telle rémunération qui convient ou tel ou tel souhait géographique, mais davantage de réfléchir en termes de stratégie pour l’entreprise de ce que signifierait de débaucher tel ou tel candidat versus tel ou tel autre. Ça, c’est vraiment, je pense, un aspect très important. Et puis probablement, ce qui change aussi, c’est que l’impact d’apporter un candidat dans un processus de recrutement est largement décuplé par rapport à un processus de recrutement peut-être à un autre niveau, parce que les enjeux ne sont pas les mêmes. Le type de poste, si on parle de rémunération au-dessus du million, c’est ce que j’ai beaucoup fait ces dernières années, on est sur des types de postes où forcément les rémunérations sont très élevées, le niveau de stress des candidats est très élevé, le niveau de temps disponible des candidats est très faible, ce qui est très contradictoire pour nous puisque ça veut dire que parfois on va être en capacité de dire on continue ou pas des échanges plus formels après 20 ou 25 minutes d’échange, ce qui est finalement relativement court pour faire un entretien structuré, etc. Alors évidemment, on ne fait pas qu’un entretien, on se revoit plusieurs fois, il y a souvent des discussions informelles, etc. Mais je dirais que ça c’est vraiment un élément important, c’est que le recruteur doit donner beaucoup plus. Et puis il y a une question de crédibilité qui se construit aussi dans le temps, qui rend notre travail à la fois très excitant mais aussi extrêmement difficile et parfois aussi un peu injuste parce qu’il arrive qu’un candidat soit parachuté dans un processus de recrutement et que malheureusement, le recruteur n’ait finalement pas forcément le pouvoir de dire non. Donc je dirais que c’est un autre positionnement et c’est d’autres attentes de manière générale. Et l’output, la conséquence, est aussi que pour nous c’est un travail un peu différent qui s’installe, c’est à dire qu’on est un peu moins dans l’opérationnel et beaucoup plus dans les échanges politiques, les échanges en termes de stratégie et la connaissance du business. Et je donne souvent un exemple très concret, c’est que quand moi j’ai commencé le recrutement, c’était il y a un petit moment maintenant, on écrivait sur les cv. Maintenant on fait tout en digital, donc le monde a changé assez vite. Mais quand j’ai commencé le recrutement, on cherchait surtout des personnalités, on voulait des gens avec qui on ait envie de travailler. Aujourd’hui, ce que me demandent un peu plus les gens avec qui je travaille, c’est de trouver les compétences qui sont rares ou des personnalités qui ont deux ou trois expertises qui normalement n’existent pas sur le marché. Donc il y a aussi un niveau d’attente sur le type de profils qu’on peut proposer, qui n’est pas du tout le même et qui évolue à mesure que le marché aussi se complexifie, depuis le Covid notamment.

Etienne – L’étincelle RH Et qu’est-ce qui te permet, en tant que recruteur, d’être crédible face à ces profils ? Tu parlais beaucoup de l’évaluation réciproque qui peut être faite. Je vais peut-être me faire des amis en disant ça, mais dans les cabinets d’executive les consultants ont parfois un certain âge, est-ce que c’est justement lié au fait de pouvoir renvoyer une fausse image de crédibilité qui reposerait sur uniquement cette dimension ? Comment on garantit ça ? Comment on arrive à se positionner et à être crédible face à ces profils ?

Léonard C’est toujours une question relativement difficile. La crédibilité, elle se construit d’abord par les connaissances concrètes qu’on acquiert : connaissance du marché, connaissance du business, connaissance des structures et aussi connaissance de l’historique des structures. Et là, on est sur quelque chose qui est de l’ordre un peu plus de l’expérience. Donc avoir, je dirais une certaine expérience et de l’âge, ça aide. Pour autant, et je pense que je suis un bon exemple parce que j’ai souvent été, je crois, partout dans ma carrière, le plus jeune, partout où je suis passé, et encore maintenant. Je m’aperçois aussi combien, parce que le monde se digitalise et que les enjeux digitaux sont importants quasiment pour tous les secteurs d’ailleurs, y compris pour les sociétés pour lesquelles j’ai travaillé, où je travaille, qui n’étaient pas toujours dans la tech. Être jeune n’interdit pas d’être crédible, au contraire. Et puis je pense que la France, pour le coup, est un pays intéressant. On voit que même parmi les dirigeants politiques, on a des gens un peu plus jeunes. Comment on construit sa crédibilité ? Je pense déjà en travaillant beaucoup, en absorbant beaucoup d’informations et de data. Je pense que ça, c’est un élément très important. Avoir des données sur lesquelles s’appuyer pour prendre des décisions pour promouvoir tel ou tel candidat est un élément extrêmement important. La deuxième chose, c’est le réseau qu’on construit, puisque le réseau, en fait, c’est ni plus ni moins que les relations qu’on a construit. Et à travers ses relations, c’est de la connaissance qu’on a pu aussi absorber puisque à chaque fois que vous interviewez un candidat, que ce soit une demi heure, 1 h ou 2 h, vous allez apprendre beaucoup de choses et ils vont vous partager aussi un certain nombre de choses importantes quant au business. Et puis il y a une troisième dimension avec l’executive search, c’est que le fait de côtoyer des dirigeants fait que nécessairement on absorbe aussi un peu de leur gravitas, de leur posture, de leurs habitudes, de leurs tics de langage aussi. Et un certain nombre d’éléments qui sont peut-être difficiles à quantifier ou sur lesquels c’est difficile de mettre des mots, mais qu’on ressent quand même assez vite en termes de posture et qui peuvent aider n’importe quel profil à se développer. Et je pense que fondamentalement, pour revenir à ta question précédente, qui était quelle est la différence entre le recrutement à ce niveau là et le reste du recrutement ? Le métier est un peu différent, mais les fondamentaux sont les mêmes. La différence, c’est qu’on attend tout en haut de la pyramide que les fondamentaux, les basiques, soient extrêmement bien exécutés. Et ça, je pense que c’est vrai d’ailleurs pour n’importe quelle discipline, si on pense à un sportif de haut niveau, un footballeur typiquement, entre son début de carrière et la fin de la carrière, il fait toujours la même chose, il fait des dribbles, des passes, il tire au but grosso modo. La différence entre un junior et une star, un David Beckham, que sais-je, c’est sa capacité justement à exécuter les basiques avec un niveau d’excellence et qualitatif qui n’a rien à voir avec ce que font les juniors.

Etienne – L’étincelle RH Donc les recruteurs executive sont les David Beckham du recrutement.

Léonard Alors pour ceux qui ont une femme glamour et dans la mode peut-être ! Et là, on parle des hommes d’ailleurs. C’est aussi intéressant parce que tu vois, je pense qu’on a un tic de langage, mais on oublie aussi beaucoup que le leadership, c’est aussi une question au féminin. Mais je pense qu’il y a quand même un petit peu de cette question d’excellence et puis d’horizons, d’attentes. Et si on regarde dans un certain nombre de cabinets de chasse, notamment dans les cinq très grands, on voit un certain nombre d’anciens dirigeants aussi qui y vont pour exploiter le réseau, pour s’occuper aussi en fin de carrière, ou tout simplement parce que ce sont des métiers extrêmement passionnants. Donc je dirais qu’il y a une proximité très forte avec ces dirigeants que, je pense, un certain nombre de recruteurs peut-être peuvent avoir du mal à gérer parce que c’est un niveau d’exigence et de pression qui est tout simplement pas forcément ce que tout le monde recherche ou ce que tout le monde peut appréhender.

Etienne – L’étincelle RH Est-ce que c’est facile en tant que recruteur, et d’autant plus recruteur executive (on parle de crédibilité, on parle d’image, de réputation), de venir partager ses peurs et de les partager aussi auprès de ses managers, auprès de ses dirigeants ?

Léonard Alors spontanément, je te répondrais qu’il n’y a jamais rien de facile dans le recrutement. Mais ça je pense que c’est vrai pour n’importe quel niveau de recrutement. Le recrutement est par définition un sport collectif et un challenge pour les individus, pour les organisations, quelle que soit la situation. Après, est-ce que c’est facile de parler de ses angoisses, de ses peurs, ses inquiétudes ? Je te dirais de la même manière que quand on est dans un rôle de leader, qu’on est très exposé, c’est toujours délicat. Après, je dirais ça dépend un peu comment on appréhende les relations de travail. Moi, de manière générale, je préfère qu’on se dise les choses, qu’on mette sur la table les désaccords, justement pour les dénouer ou éventuellement qu’on parte d’un meeting en se disant qu’on est d’accord de ne pas être d’accord. Et après tout, on ne peut pas être d’accord sur tout et ça fait partie du monde du business et c’est ok. Il faut juste qu’il y ait une personne éventuellement qui tranche dans un cas de désaccord, on va dire très concret. Mais je pense que de manière générale, si tu construis ta crédibilité et que tu fais les choses bien, on t’en voudra jamais de partager un peu de vulnérabilité et au contraire. Je pense qu’il faut juste choisir un peu le moment et les formes. Et je dis toujours aussi aux équipes avec lesquelles je travaille « il y a des bons moments pour parler d’un certain nombre de sujets et des mauvais moments ». Et effectivement, quand il y a d’autres sujets plus urgents, parfois ce n’est pas le bon moment. Donc tout dépend comment on dit les choses. Mais moi je fais partie de cette génération qui est habituée à ce qu’on se dise les choses de manière assez directe, assez franche, et je pense que ça nous aide, y compris quand on a des angoisses, y compris quand on a des peurs. Alors après, il ne faut pas qu’on tombe trop dans ce côté très psychologique, les gens avec qui on travaille ne sont pas nos psychanalystes, soyons clairs, mais je pense que c’est important de se dire les choses et aussi ça permet de dénouer un certain nombre de problèmes.

Etienne – L’étincelle RH Merci Léonard. On va arriver à la fin du podcast, quels conseils tu pourrais donner à un jeune RH ou un jeune recruteur qui démarre dans sa vie professionnelle et qui démarre sur ses premiers postes d’executives ?

Léonard Alors je dirais que c’est deux questions en une. À un jeune RH, je lui dirais de développer sa connaissance du business et de surtout ne pas aller en RH parce qu’il aime les gens, mais d’aller en RH parce qu’il voit la puissance et la force du facteur humain sur les autres facteurs du business. Ça je pense que c’est un élément important et je pense que beaucoup de gens viennent dans les ressources humaines pour des mauvaises raisons. Si on vient à ta deuxième partie de questions sur un recruteur, qu’est-ce que je lui dirais ? Je lui dirais de toujours être extrêmement bien préparé. Je pense que ça, c’est vraiment… Ça semble assez trivial comme conseil, mais fondamentalement, venir préparé partout où vous allez, sur toutes les discussions que vous avez, savoir à qui vous parlez. Je suis un individuel contributeur maintenant, j’ai eu une équipe assez large par le passé, je disais toujours à mes juniors « Qu’est-ce qu’on a sur la personne ? » Ça les faisait beaucoup rire, mais pour moi, c’était très clair que, avant de voir quelqu’un, quel que soit le contexte professionnel, semi-professionnel, personnel, je voulais savoir qui est la personne et grosso modo, qu’est-ce qui peut être intéressant pour créer du lien, pour créer la conversation, mais aussi potentiellement qu’est-ce qui doit être su pour éviter de faire un impair qui va faire qu’on n’a plus de crédibilité du tout. Et je pense que la préparation, de ce point de vue là, elle est clé pour à peu près toutes les situations dans la vie, mais a fortiori sur le recrutement où la valeur de ce qu’on fait, c’est notre réseau, c’est notre capacité d’analyse, mais c’est aussi notre capacité à créer du lien avec la personne qu’on rencontre. Et ça, je pense que c’est vraiment, vraiment fondamental, puisque le métier d’executive recruteur c’est un métier comme n’importe quel métier de recruteur d’ailleurs, qui est au croisement de la communication, de la vente, des ressources humaines et du business de manière générale. Donc, connaître les gens avec qui on est et être bon avec les gens, ça je pense que c’est vraiment important. Le people management, c’est vraiment très important et je pense que n’importe quelle personne qui a réussi dans le business, notamment les entrepreneurs, ils me disent tous la même chose, ils me disent qu’on peut être très bon dans le business si on maîtrise ce facteur humain et même si on n’a pas d’autres compétences. Et ça, je pense que c’est un élément important. Et puis après, je dirais être très proche des business, ça veut dire aussi de temps en temps passer du temps avec eux. Je pense que ça, c’est vraiment important. La fonction recrutement a une certaine tendance, la fonction RH de manière générale d’ailleurs, a une certaine tendance à vivre un petit peu en vase clos, à se retrouver entre RH et discuter de pratiques RH avec d’autres praticiens RH, ce qui en soi est intéressant. Mais je pense que la fonction gagne beaucoup à être vraiment dans le business et à comprendre les enjeux business et à faire partie du business.

Etienne – L’étincelle RH Merci.

Léonard Merci à toi.

Intro/Outro Merci d’avoir écouté bande de Philippe. Un podcast produit et imaginé par l’Etincelle RH en partenariat avec le label. Si vous avez des remarques, des suggestions ou si vous voulez partager vos peurs, vous pouvez envoyer un message sur l’usine à Etienne à genoux. On se retrouve dans deux semaines pour découvrir un autre membre de la bande de Flipper. Bouh!